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Mémoires de danse

Tristesse tanguera

9 août 2021

Tiens, hier, en allant tangoter sur les quais de Seine, j’ai rencontré un vieux copain parti depuis trois ans s’installer à Buenos-Aires pour danser le tango.

Le malheureux !! ll n’était pas arrivé depuis très longtemps que, patatras, TOUTE activité tanguera s’est arrêtée du jour au lendemain pour cause de COVID.

Plus de milongas (sauf quelques soirées clandestines rapidement devenues des clusters à virus), plus de cours, plus de spectacles, plus de stages, plus de concerts, plus de touristes apportant leurs devises fortes, plus rien. La Tango en coma dépassé dans sa mère-patrie !! Pire que pendant la période de déclin des années 1960-1970. Un cataclysme historique !!! 

Pour mon copain c’était certes décevant. Mais le pire, c’était pour tous ceux qui tirent leur subsistance du tango : professeurs et écoles de danse, artistes , DJ, organisateurs de milongas et propriétaires de salles, cuisiniers, serveurs, femmes de ménages, agents de sécurité, etc.

En tout 2000 familles environ, soit disons 10000 personnes. Et très exactement celles qui faisaient vivre l’âme du tango en lui dévouant leur existence. Ciblées comme au tir de précision !! Frappées de plein fouet !!! Pile dans le mille !!! Pas un qui en réchappe !!! Un génocide économique (sans compter les dégâts psychologiques) !!!!

Et sans oublier, bien sur, les hôtels et les restaurants qui ont fait faillite par centaines.

Au début, les gens pensaient qu’on en aurait pour quelques semaines. Mais cela fait maintenant un an et demi que ça dure (ou plutôt que tout s’est arrêté net…).


Vous imaginez les conséquences pour la vie quotidienne de ces personnes, ceux justement qui oeuvrent, au jour le jour, pour que le tango existe !!! Surtout que la plupart d’entre elles travaillaient plus ou moins au noir et n’ont reçu aucune aide publique. Même les travailleurs déclarés, d’ailleurs, n’ont pas non plus reçu grand’chose d’un Etat argentin toujours menacé de banqueroute…

Cela évidement me fait beaucoup de peine pour ces gens. Mais cela m’inquiète aussi pour l’avenir du tango d’Argentine, qui mettra sans doute -du fait de la faillite et de la désorganisation des structures antérieures à la crise – beaucoup de temps à se relever. Et ce d’autant que la vaccination, malgré une accélération récente, est dans ce pays un peu à la traîne des pays développés. 

Et puis, dans quel état se relèvera-t-il, ce tango d’Argentine ? Avec des masques, de la distance sociale, des jauges, etc… -toutes choses plus ou moins contradictoires avec la logique de sociabilité chaleureuse des milongas ? Retrouverons-nous un jour l’atmosphère de promiscuité sensuelle de l’avant-crise, qui faisait des pistes de milongas une sorte de club échangiste en position verticale, un grand espace de rencontres amicales et amoureuses, bien plus convivial que Meetic ?

D’ailleurs, à vrai dire, quoi de moins Covid-compatible que le fait de danser, tous les soirs pendant 3 ou 4 heures, étroitement enlacé et pratiquement bouche contre bouche, avec une quinzaine de partenaires différent(e)s ? C’est sur que le taux de reproduction du virus doit atteindre des sommets dans ces conditions !!!

Alors, fort logiquement, un petit dictateur sanitaire en herbe ne risque-t-il pas d’interdire un jour purement et simplement cette danse pour cause de contagiosité ? Ce serait dans la logique des temps, non ?

Bref, l’avenir du 2X4 est bien incertain !!! Comme celui de nos libertés, de notre insouciance et de notre joie de vivre, d’ailleurs !!!!

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