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Petites pochades sans importance

Un peu de propagande subliminale

20 octobre 2021

Pour apprendre le chinois, je lis en ce moment des petits livres publiés par l’université de Pékin.

Il racontent chacun un conte traditionnel ou un épisode de l’histoire chinoise.

Ils sont très bien faits, classés par niveaux de difficulté selon les besoins des étudiants, avec le vocabulaire et la grammaire soigneusement annotés.

En plus, les histoires sont souvent passionnantes.

Mais je me suis tout de même aperçu d’un problème : c’est qu’ils diffusent de manière subliminale une idéologie à la fois nationaliste, autoritaire et vaguement expansionniste.

J’ai ainsi eu droit successivement :

– A l’histoire du premier empereur chinois Qinshihuang, qui a réussi à unifier le pays en créant une langue et une monnaie communes. Certes, il était assez cruel, très autoritaire et supportait mal la contradiction (têtes coupées, gens enterrés vivants, etc.), mais enfin, vous comprenez, dans un si grand pays il faut un gouvernement fort dirigé d’une main ferme, sinon tout risque de partir en live.

– A l’histoire de la princesse Wang Zhaojun, qui, sous la dynastie Han, a été mariée avec le roi des Mongols, faisant bénéficier ces barbares arriérés des bienfaits de la civilisation chinoise : médecine, techniques agricoles, etc.

– A l’histoire de la princesse Wensheng, sous la dynastie Tang, s’est mariée avec le roi du Tibet (une manie, ces mariages avec les rois des peuples voisins !!!), faisant cette fois profiter les pauvres tibétains éperdus de reconnaissance d’une colossale aide au développement avant la lettre. Comme quoi l’influence chinoise a toujours été super-bénéfique pour le Tibet !!

– A l’histoire de l’explorateur Sheng He, qui sous la dynastie Ming a dirigé de grandes expéditions maritimes dans l’Océan Indien, mais pas comme ces salopards d’Européens qui ne cherchaient qu’à coloniser et à piller. Les empereurs chinois, eux ne recherchaient bien sur que l’amitié des peuples voisins, et leur ont (encore une fois) apporté avec une générosité désintéressée les bienfaits de leur civilisation, comme le thé et la médecine… sans oublier, en prime et pour changer, une princesse chinoise mariée au sultan de Malaisie.

– Et, à l’époque contemporaine (c’est-à-dire sous la dynastie Mao), l’histoire d’un entrepreneur de l’université de Pékin qui développe un logiciel en chinois permettant de se passer des logiciels anglophones d’importation, mais qui se le fait pirater – Ceci permettant d’admirer la remarquable efficacité avec laquelle la police chinoise, serviable et hyper-réactive, met les criminels hors d’état de nuire.

Finalement, on sort de ces lectures à peu près convaincu que la civilisation chinoise est la première du monde, que la Chine a toujours voulu faire le bien des peuples voisins, que le Tibet et la Mongolie (entre autres) ont tout à gagner à être intégrés dans la sphère d’influence chinoise, et que rien ne vaut mieux qu’un gouvernement autoritaire, appuyé sur une police efficace, pour diriger l’Empire du Milieu.

En particulier, les empereurs chinois des temps anciens sont uniformément décrits comme clairvoyants, bienveillants et soucieux du bien-être de leurs sujets, comme si les dirigeants chinois actuels s’identifiaient à eux et se réclamaient de leur héritage.

Bref, je propose qu’on attribue à l’équipe Sinolingua de l’université de Pékin le prix Augusto Pinochet pour sa contribution à la diffusion d’une idéologie politique nationaliste et autoritaire.

Mais enfin, si j’étais la fille de Xi-Xing-Ping, je me méfierais un peu, histoire qu’il ait l’idée de me marier à un dictateur d’Afrique australe ou d’Asie du sud-est !!!

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