L’autre jour, je marchais rue de Richelieu.
J’avais la tête embrumée par toute une série de pensées désagréables : montée de la délinquance, traites à payer, recommandés à aller chercher, etc.
Et puis je suis passé devant la Bibliothèque nationale.
Cela m’a rappelé un doux souvenir de jeunesse.
J’avais à peine passé mes 20 ans, j’avais tous mes cheveux, j’étais célibataire et j’étais très amoureux d’une universitaire spécialiste de littérature allemande médiévale.
Elle était très savante, mais elle avait aussi de très beaux seins dont elle était très fière.
Elle m’aimait beaucoup et même plus que ça, alors de temps en temps, je venais la chercher à la BN.
Je l’attendais à la sortie de la grande salle de lecture où elle consultait des palimpsestes gothiques à longueur de journée pour alimenter ses travaux de recherche.
Ensuite, on allait manger des huîtres au Palais-Royal. Et puis, on rentrait chez elle où elle m’ouvrait son palimpseste personnel pour une consultation privée.
Mais, ce jour-là, en la voyant sortir de la salle de lecture, avec ses beaux seins mis en valeur par sa chemise moulante, je n’ai pas eu la patience d’attendre.
Comme il n’y avait pas grand monde autour de nous, je l’ai un peu plaquée contre un mur pour l’embrasser.
Je précise bien que ce n’était pas une agression sexuelle, juste une anticipation sur la suite de la soirée.
Et puis, j’étais jeune, la testostérone bouillonnait en moi !!!
Elle ne m’a pas tout de suite repoussé, mais enfin au bout d’une seconde ou deux, elle m’a quand même dit : « pas ici, on pourrait nous voir ».
Il faut dire qu’en temps ordinaires, il y avait une concentration de trois directeurs de recherche au CNRS par mètres carrés dans le coin… ça aurait pu faire jaser dans les chaumières académiques !!!
Alors je lui ai dit : «qu’est-ce qu’on fait ? »
Et m’a regardé en réfléchissant, puis elle m’a répondu : « viens, j’ai une idée. Suis-moi ».
Elle connaissait la BN comme sa poche.
Alors, on a pris une petite porte, on a descendu un escalier, on s’est retrouvés dans un couloir désert, on a tourné à droite, puis à gauche, on a encore un peu marché dans un couloir désert et sombre, et on est entrés dans une sorte de réduit désert, sombre et minuscule. Là, elle s’est retournée vers moi et elle m’a embrassé.
Ensuite, pour dire les choses élégamment, nous avons laissé parler notre nature, debout dans un sous-sol du temple de la culture.
Puis on s’est rhabillés, on est remontés, elle a salué quelques collègues qui se sont poliment enquis de l’avancement de ses recherches sur les palimpsestes médiévaux allemands, et on est allés manger des huitres comme d’habitude.
C’était trop bien !!!
C’est formidable d’être jeune, on fait plein de bêtises et de trucs insensés !!
On n’est pas sérieux, quand on 27 ans !
Aujourd’hui, je n’oserai plus faire une chose pareille.
Ça tombe bien, parce que je pense aussi que peu de femmes auraient envie de le faire avec moi. J’étais jeune, j’étais mignon, j’avais 30 ans et 20 kilos de moins…
Tout cela m’a quand même donné envie de m’inscrire à des cours de littérature allemande médiévale à l’université du troisième âge. Peut-être que la conférencière sera brillante et aura des beaux seins. Qui ne tente rien n’a rien…
On n’est pas sérieux, quand on a 60 ans.