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Carnet de Voyage 2011 à Cuba

Un magnifique concert gratuit de Candido Fabre… qui aurait pu me coûter très cher

Santiago de Cuba, Dimanche 10 Juillet

Vous voyez cette belle photo de Candido Fabre, prise à trois heures du matin ? Elle aurait pu me coûter très très cher. Je vais vous raconter l’histoire.

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Samedi, c’était le dernier jour de la fête du feu à Santiago. Une chance extraordinaire : tout le défilé de la fête du Feu passait exactement devant les fenêtres de ma maison, dans la rue Padre Pico. Il y avait plein de Cumparsas colorées. J’ai filmé, photographié. Je vous montrerai le diaporama un autre jour, si Dieu me prête vie. Mais ce n’est pas de cela que je veux vous parler aujourd’hui. Voici quand même une photo du défilé.

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Là, les Cumparsas partent vers la mer, dans le quartier Alameda, pour assister à la « Quema del Diablo » : on brûle le Diable au bord de l’eau, pour chasser le mal.

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Il y a aussi ce jour-là, la Conga qui défile. La Conga, c’est un grand groupe de gens qui avancent très lentement, enbalançant les hanches en rythme, au son obsédant des tambours et du cornet chinois. Quand la Conga arrive, toute la rue se précipite en courant pour la regarder passer, comme vous le voyez sur cette photo, prise rue Padre Pico.

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Là, les gens se regroupent à l’entrée de la rue Enramada, d’où va déboucher la Conga.

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C’est la Conga du quartier de Los Hoyos, une des plus célèbres de Santiago, qui animait cette année la fête du Feu. Pendant que je prenais cette photo, je me trouvais sur la terrasse d’un grand marché couvert, où mes amis Cubains, très excités par le passage de la Conga, m’apprenaient le pas de base de cette marche.

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Je n’ai pas vu brûler le Diable : Par contre, je suis allé me promener après diner avec des amis cubains dans le quartier Los Alameda, vers 22 heures. Un monde fou, peu de lumière, mais une ambiance que j’ai perçue, à ce moment, comme familiale et tranquille. Mes copains me disaient : « Méfie-toi, c’est dangereux ici ». Moi, un peu inconscient, je me sentais au contraire très en sécurité. J’aurai bien voulu voir le concert de Candido Fabre, mais, à 23 heures, il n’avait pas encore commencé. L’habitude de ce chanteur, en effet, est de commencer à jouer à 1 ou 2 heures du matin pour terminer son concert au lever du soleil.

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Ensuite, je suis allé me coucher. Mais je me suis réveillé vers 2-3 heures du matin. Alors, je me suis dit : « Quitte à ne pas dormir, autant aller voir le concert et prendre quelques photos ». Il suffisait de marcher quelques centaines de mètres pour descendre vers le quai. J’avais bien raison et très, très, très, tort. Là, vous voyez une photo que j’ai prise en approchant du lieu du concert. Elle n’est pas très bonne, mais elle donne, justement, une idée du climat à la fois très vivant, populaire, et un peu obscur et glauque, de l’endroit.

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Là, vous voyez la scène de côté. Je suis en train de m’approcher du concert pour essayer de prendre une ou deux photos de plus près.

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J’entre alors dans la foule, c’est-à-dire dans la gueule du loup ou plutôt du crocodile. Une cohue inimaginable. Tous les gens très serrées les uns contre les autres, se bousculant parfois à dessin, pour se provoquer. Les hommes, une bouteille de rhum à la main. Les femmes, aguicheuses, provocantes. On sent que les bagarres peuvent éclater pour un rien. Je suis pratiquement le seul Blanc, avec à la main mon appareil photo. La proie idéale. Je commence à sentir des mains baladeuses sur les poches de mon short. Au début, je crois que c’est juste un incident isolé. Je m’approche de la scène et commence à prendre des photos de Candido Fabre.

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Mais les mains continuent visiblement à se balader sur mon short. Là, je commence à avoir un peu peur. Mais je continue à prendre mes photos, tout en faisant de plus en plus attention.

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Et puis, je fais une rencontre surprenante : une Jinetera assez jolie, mais avec quelque chose d’un peu fixe sur sa figure maigre, qui m’avait déjà fait des avances à la Casa de la Trova et sur la Place Cespedes, me suivant même une nuit sur le chemin de ma maison. Là voir plantée là, devant moi, avec son visage beau et inquiétant, alors que je commençais à me préoccuper sérieusement pour ma sécurité, m’a violemment impressionné : comment ce hasard pouvait-il se produire ? Pourquoi encore elle, sur mon chemin, comme une figure érotique du destin ? Quel Orisha ou quel esprit protecteur lui avait prédit que je serais justement là, à ce moment, pour cette improbable rencontre si assidûment recherchée par elle ? Que faisait là cette seule figure connue et faussement amicale, surgissant comme une apparition angoissante et tentatrice de cette foule dense d’anonymes ? Qu’importe, je n’étais pas encore en état de fuite, alors je la prends dans mes bras et nous commençons à danser, pendant que je continue à photographier. Là, Candido Fabre semble nous regarder avec sévérité, elle et moi, avec son visage noble et dur.

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Mais les palpations corporelles continuent, Tout d’un coup, je comprends qu’il faut que je parte de là, très, très, vite, si je ne veux pas rencontrer de gros problèmes dans les minutes suivantes. D’ailleurs. Candido Fabre a l’air de me le dire aussi : « Vas-t’en, le touriste Blanc, c’est dangereux pour toi, ici ».

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Alors, je laisse tomber ma Jinetera du Destin et je m’en vais. Je cherche à traverser la foule, mais elle est compacte. Maintenant, je me sens suivi, encadré par trois ou quatre types comme le gibier par un groupe de chasseurs. Je fais des circonvolutions pour leur échapper. Je traverse une, deux bagarres violentes. Je bouscule un couple en train de danser une sorte de mouvement de copulation. J’ai peur, mais en même temps, je savoure l’énergie extraordinaire que se dégage de cette foule, semblable à une forêt tropicale ondulant au vent puissant de la voix vraiment magnifique de Candido Fabre. Ils lèvent les bras, balancent leurs corps tous ensemble. Mille voix jeunes et enthousiastes reprennent les refrains des chansons. L’ambiance est vraiment survoltée. Mais moi, je fuis mes poursuivants, un peu comme la jeune fille fuit la Mort pendant la Carnaval de Rio, pendant les dernières scènes du film Orfeo Negro. Un autre Carnaval, justement !!

Bon, je vous passe la suite, je finis par semer mes poursuivants (imaginaires peut-être ?). Je m’éloigne du concert. Mon sentiment à la vue du premier uniforme de police que je rencontre est à peu près semblable à celui du naufragé sur son radeau apercevant une île après quelques jours de dérive… Je jure sur les Saintes Ecritures de Fidel de ne plus jamais dire de mal de la police cubaine !!! Bref, en rentrant chez moi, je m’aperçois qu’on m’a quand même volé mes clés. Bon, moindre mal, ça aurait pu être bien pire. mes logeurs en sont quittes pour changer la serrure de la maison. Mais J’apprendrai plus tard qu’un type s’est fait descendre à coup de couteau au petit matin de cette nuit-là, tout près de l’endroit où je me trouvais.

En conclusion, un conseil : Santiago de Cuba reste une ville à peu près sure si on reste dans un périmètre touristique raisonnable et qu’on se renseigne sur le niveau de sécurité des lieux où l’on veut se rendre. Mais éviter d’aller n’importe où, n’importe quand, avec n’importe qui, si vous ne voulez pas vous faire dépouiller, ou pire…

Fabrice Hatem

 

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