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Historias minimas

Une colère de l’Empereur

Danenworth, le 19 avril 1809

bert2 Il a reçu un sacré savon, Berthier. Nous, les aides de camp du grand Etat-major, étions gênés de voir notre chef traité ainsi, plus bas que terre, par l’Empereur. C’était il y deux Jours : Napoléon venait d’arriver le matin même, à bride abattue, de Paris, pour sauver l’armée d’Allemagne du désastre.

berth4 « – Vous êtes un incapable, un jean-foutre, tout juste bon à larmoyer devant le portrait de votre belle italienne !!! » « – Mais, sire, je n’ai fait qu’exécuter vos ordres » « – Mes ordres n’étaient pas de laisser Davout se faire encercler à Rastisbonne par l’archiduc Charles ! Faites preuve d’un peu de jugeotte, mon pauvre ami !! Quand on voit 60 000 autrichiens converger des deux côtés du Danube, on fait rétrograder les corps trop avancés ; un vélite le comprendrait !! » « – Mais vos ordres… ». « – Ah, assez, avec mes ordres ! Tout ce que vous êtes capable de faire, c’est les recopier pour aller jouer ensuite au perroquet devant les autres Maréchaux, qui eux, savent gagner des batailles !! » « – Sire, j’attendais confirmation du mouvement de l’archiduc pour porter l’ordre de repli à Davout ! » « – Oui, et si vous aviez encore attendu vingt-quatre heures de plus, c’est tout le 3ème corps qui était perdu !! ».

berth5 Il n’avait pas tout à fait tort, l’Empereur. Depuis que l’archiduc Charles avait attaqué en Bavière le 10 avril, tout était allé a hue et à dia dans notre armée. Marches et contre-marches sans rime ni raison, ordres obscurs et insensés, auraient dix fois transformé notre avance en déroute si nos chefs de corps n’avaient réussi à faire parfois, entendre un peu raison à cet animal de Berthier, et si les autrichiens avaient été un peu plus téméraires. Mais, depuis Austerlitz, ils prenaient la plus stupide de nos manoeuvres pour un génial coup d’audace. Plus nous donnions maladroitement le flanc à leur attaque, et plus ils reculaient, convaincus d’être exposés à un piège dont ils ne parvenaient pas – et pour cause – à comprendre la logique. L’ombre géante de l’Empereur, la peur qu’il inspirait à l’Ennemi, même à 500 lieues de distance, ont ainsi sauvé l’armée d’un désastre que l’ineptie de Berthier aurait pu entraîner à tout moment. N’empèche que Napoléon a commis une erreur en le nommant commandant en chef de l’armée d’Allemagne.

berth6 Ce Berthier, c’est peut-être un grand chef d’Etat-Major, mais il ne paie vraiment pas de mine. Petit, gros, vilain, il se ronge les ongles sans arrêt. avec tous ses rubans, et ses plumes, il a l’air d’un faisan doré aux griffes abimées. Devant l’Empereur, il fait des courbettes. Devant les officiers, il se pavane en expliquant qu’il tient les ordres directement de la bouche du Maître.

berth3 Je sais que c’est mal de parler ainsi de son chef, mais que voulez-vous !! C’est moi qui ai du porter à Davout, le 13 avril, l’ordre absurde de se maintenir à Ratisbonne. En arrivant là-bas, j’ai manqué d’être fait prisonnier par des hussards autrichiens déjà avancés à quelques lieues de la ville. J’ai assisté à a grande colère de Davout, un vrai soldat et un vrai chef, celui-là !!!. L’ordre de Berthier, il l’a piétiné de rage, lui d’ordinaire si maître de lui. Et il avait raison. Ce petit mot que j’ai apporté a coûté hier la vie à 2000 de nos braves, et cela aurait pu être bien pire sans l’adresse de Davout qui a réussi à s’échapper du piège au dernier moment. bert1

Alors, après cela, malgré mon bel habit rouge, mon colback et mon dolman d’aide de camp, je commence à en avoir un peu assez de servir à l’Etat-Major. Avec mon ancienneté, je pourrais être nommé chef de bataillon dans l’infanterie. Ou bien peut-être, rentrer à l’état-major de Davout ou de Lannes. De vrais chefs, ceux-là, pas des têtes de mules comme Berthier.

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