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Vie culturelle

Les jours et les nuits de Mariana B., La Salida n°49

ImageEditeur : La Salida, n°49, juin-septembre 2006

Auteur : Mariana Bustelo

De quoi parle-t-on quand on parle de tango ?

Une succession d’événements ou plutôt une juxtaposition de commentaires entendus et lus un peu par hasard, m’ont poussée à réfléchir sur le tango en général et sur la danse en particulier. Il y a quelques jours, un ami m’a envoyé un article de journal qui comparait les bienfaits du tango à ceux de la gymnastique, statistiques et infographies à l’apparence scientifique à la clé. L’image d’une milonga m’est venue en tête, puis celle d’une salle de musculation… Et je pensais ironiquement à l’abîme qui les séparait.

Mais, quelques jours plus tard, un couple de danseurs amateurs qui sortaient d’un bal, trempés de sueur, m’ont dit : « Nous sommes épuisés. On s’entraîne depuis trois heures, sans arrêt ». Ils ne dansaient pas, ils s’entraînaient… ils allaient au tango comme à une salle de gymnastique… Peut-être avaient-ils lu le même article que moi, mais en en tirant des conclusions opposées ?

Encore une fois, l’image de la milonga m’est venue en tête. Mais cette fois-ci l’espace était peuplé de danseurs qui pratiquent depuis longtemps, avec parfois des éloignements vis-à-vis du tango suivis de retours, qui ne dansent pas tout le temps pendant le bal, mais attendent le morceau qui les touche et choisissent leur partenaire en fonction de leur état d’esprit. Pour maintenir le plaisir de danser, mais aussi la liberté qui est à la base du tango*.

Pour moi, le tango est une danse, mais aussi une culture. Et c’est aussi quelque chose dont il ne faut pas abuser : si dans certaines périodes j’écoute peu de tangos, c’est parce que j’ai aussi besoin de retrouver le désir violent d’en écouter. Et je fais de même avec la danse, comme un gourmet qui ménage son palais.

(* ) Comme l’explique Dinzel dans son livre El tango, una danza. « Esa ansiosa búsqueda de libertad ».

L’histoire vivante du tango

Café de los Maestros est un projet visant à créer une mémoire collective de l’histoire du tango, fondé sur des témoignages d’artistes vivants. Il a débuté en 2003 par des enregistrements de musiciens célèbres encore en activité aujourd’hui, mais tous âgés de plus de 70 ans, comme Mariano Mores, Leopoldo Federico, Alberto Podestá, Atilio Stampone, Ernesto Baffa, Virginia Luque, Horacio Salgán, Emilio Balcarce et José Libertella (aujourd’hui décédé). Ce projet s’est concrétisé par l’édition de deux CDs en 2005, suivie aujourd’hui par un livre de photographies et d’entretiens proposé par Irène Amuchástegui.

L’auteur, qui a suivi toutes les étapes du projet, retrace l’itinéraire de ces musiciens dans un ouvrage composé d’une partie générale consacrée à l’histoire du tango et d’une partie où sont regroupés des entretiens, dans une succession de chapitres dédiés chacun aux souvenirs d’un artiste. Un lien entre le passé et le présent de la musique tango est ainsi établi. L’ouvrage est illustré par des photos de Nora Lezano et Sebastián Arpesalla, prises pendant les enregistrements, ainsi que par des photos historiques jusqu’à présent inédites.

Le projet va se poursuivre en août 2006 avec un concert au Théâtre Colón de Buenos Aires : si vous vous trouvez à Buenos Aires cet été, ne ratez pas cet événement destiné à entrer dans l’histoire. Plus tard est prévue la sortie d’un documentaire de Miguel Kohan produit par Walter Salles (Carnets de voyage). Un Buena Vista Social Club façon tango ? Gustavo Santaolalla, responsable de ce projet – ainsi que producteur de Bajo Fondo Tango Club – refuse cette comparaison, insistant sur la recherche d’authenticité qui a guidé sa démarche.

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