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Cinéma cubain et de salsa

El Benny

Drame musical de Jorge Luis Sánchez, Cuba, 2006, 126 minutes

Image Cinquante ans après sa mort en 1963, le chanteur et directeur d’orchestre Benny Moré reste l’un des icônes les plus révérées de la musique populaire cubaine. Ce film nous conte sa vie et sa carrière en prenant comme point focal les dix dernières années de son existence- les plus fructueuses sur le plan artistique avec la formation de sa Banda Gigante – entrecoupées de nombreux flash-back sur sa jeunesse.

Un homme d’origine très modeste, et qui sut garder un contact privilégié avec l’âme populaire ; un personnage solaire, séduisant et généreux, mais progressivement détruit par d’alcool ; un artiste génial à l’énergie débordante, mais parfois peu fiable dans ses engagements : c’est ainsi que nous apparaît El Benny à travers ce film, d’une manière beaucoup plus saisissante que dans les ouvrages ou films documentaires que j’avais auparavant consultés sur lui.

Les deux approches sont d’ailleurs complémentaire : les biographies consacrées au chanteur (livre ou film) permettant de découvrir avec précision les étapes de son parcours artistique et personnel ; et la bio-fiction, de rentrer dans l’intimité d’un homme, avec ses joies, ses souffrances, ses amours, ses faiblesses, et surtout son charme immense. Dans les dernières minutes du film, la reconstruction fictionnelle se mélange d’ailleurs avec les documents d’archive pour nous faire ressentir l’immense émotion que provoqua sa mort au sein du peuple cubain.

L’image et la voix de Benny Moré sont si connues qu’une interprétation convaincante de son personnage constitue un redoutable défi pour un acteur. L’excellente prestation de Renny Arozarena dans le rôle titre n’en n’est que plus remarquable. L’acteur parvient en effet à restituer de manière très crédible l’allure, le jeu de scène et jusqu’aux tics de Benny, comme sa bouche légèrement tordue lorsqu’il chantait.

Saluons aussi l’excellente bande sonore du film, réalisées pour l’occasion, et qui permet de bien retrouver la sonorité de la Banda Gigante et de la voix du Benny (interprétée par Juan Manuel Villy Carbonell), dans les thèmes les plus emblématiques de son répertoire. Je suis cependant un peu surpris qu’une plus grande place n’ait pas été laissée aux véritables enregistrements d’époque, qui constituent tout de même un élément essentiel de cette histoire.

Le film vaut aussi par la très intéressante reconstitution historique de l’univers des cabarets latinos et cubains des années 1950, depuis les troquets de bas étage jusqu’aux casinos de luxe, avec sa faune d’entrepreneurs de spectacles aux allures de gangsters et de chanteuses plus ou moins entretenues. L’impact destructeur de la révolution cubaine sur ce milieu – et par conséquent sur le dynamisme de la vie musicale auquel il servait de creuset – est également très bien mis en lumière dans les dernières scènes du film.

Aller voir El Benny : vous apprendrez beaucoup sur la musique cubaine des années 1950 tout en passant un très bon moment.

Fabrice Hatem

Pour plus de renseignements : https://en.wikipedia.org/wiki/El_Benny

Pour visionner quelques extraits de ce film : https://www.youtube.com/watch?v=F3DUwENQh6E

 

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