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Reflets du cinéma latino-américain

Piel

Fiction de Arí Maniel Cruz, Porto Rico / États-Unis, 2011, 102 minutes

ImageCe film dégage un climat morbide d’une grande violence. Une petite fille, est témoin du suicide de son père – qui vient sans doute d’assassiner sa mère – sur une plage de Porto-Rico.: Des années plus tard, devenue une jeune femme, elle habite dans un quartier porto-ricain de New-York, où elle travaille comme manucure. Sa parfaite maîtrise de la langue anglaise, au sein d’un milieu resté très hispanophone, et son goût pour les climats froids – alors qu’elle porte elle-même le prénom évocateur de Solimar – témoignent sans doute d’un désir de rompre avec son passé. Elle est cependant régulièrement assaillie par les cauchemars de son enfance. Des cauchemars qui commencent à se mêler à la réalité lorsqu’elle noue une liaison amoureuse avec son voisin de palier, qu’elle soupçonne aussi d’avoir assassiné sa précédente compagne.

Autour de cette trame, le cinéaste parvient à créer par différents moyens un climat d’angoisse très pesant, confinant parfois à la folie : gros plan sur des visages hébétés par la peur ; musique grinçante soulignant la montée des tensions intérieures ;  objets détournés de leur fonction habituelle pour se transformer en inquiétants présages, comme ces traînées de vernis à ongle rouge ressemblant à du sang ; accumulation d’indices inquiétants suggérant, sans jamais la prouver tout à fait, la culpabilité de l’amant.

La personnalité ambigüe des personnages secondaire ajoute encore à la lourdeur de ce climat. Le grand ami homosexuel de l’héroïne, le sympathique Amalia, a tout de même euthanasié son compagnon pour mettre fin à ses souffrances. La mère de l’amant, toute attentionnée qu’elle soit avec sa nouvelle belle-fille, est terriblement intrusive et semble prête à tout pour protéger et conserver son fils. Son personnage envahissant et impérieux sous des allures benoîtes, fait irrésistiblement penser à ceux de « Psychose »  ou de « Rosemary’s Baby ».

Il manque cependant à ce bon film quelques qualités pour être vraiment exceptionnel. Certaines scènes, tournées de manière peut-être maladroites, comme les courses éperdues de l’héroïne dans la neige ou dans le métro de New-York, peinent un peu à provoquer le sentiment recherché de panique paroxystique. La fin du film tourne un peu court, et l’intrigue retombe un peu comme un soufflet. On passe cependant à regarder cette œuvre très recommandable un assez bon moment – ou plutôt assez mauvais, selon l’objectif du réalisateur.

Fabrice Hatem

(Vu au festival Filmar en America latina, à Genève, le jeudi 22 novembre 2012)

www.filmar.ch

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