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Textiles techniques : un nouveau tissu industriel pour la France

Editeur : Le nouvel économiste, n°1280, 19 novembre 2004
Auteur : Fabrice Hatem

Textiles techniques : un nouveau tissu industriel pour la France

nouvelecocom Entre les points forts incontestables de notre pays et les activités où la bataille est déjà perdue, il existe parmi les secteurs d’avenir une catégorie intermédiaire, où les atouts et les handicaps français se compensent. Un exemple : les textiles techniques.

Ceux-ci se distinguent des fibres traditionnelles par leurs propriétés particulières en termes de résistance, de souplesse ou d’adaptabilité. Parmi les centaines applications recensées citons par exemples : des filets de sécurité et de protection contre la grêle ; des bas de contention à usage médical ; des draps intégrant des microprocesseurs capables de détecter les anomalies physiologiques ; des vêtements dont les caractéristiques se modifient en fonction du temps pour protéger du froid, du soleil ou de la pluie ; des voiles de bateaux ; des fils à haute ténacité pour airbags : un marché estimé à 70 milliards de dollars, soit environ 20 % de l’ensemble des produits textiles. Avec une croissance rapide, sans être toutefois exceptionnelle : + 4 % annuels en tonnage (mais bien sur beaucoup plus en valeur) entre 1995 et 2005 selon les estimations du Cabinet David Rigby. Parmi les segments particulièrement dynamiques, on peut citer l’environnement, le sport, la santé, la construction, les géotextiles ; le principal domaine d’application restant toutefois le transport.

Une révolution initiée par différents acteurs : les fabricants de matériaux, qui ont conçu de nouveaux types de fibres (fibres de verres, de carbone, nouveaux types de plastiques..) ; les entreprises de textiles qui ont reconverti leur savoir-faire traditionnel dans de nouvelles applications ; enfin, les firmes spécialisées (en vêtements de sport et en matériel médical notamment), qui ont développé des compétences propres et des produits nouveaux.

Le potentiel européen reste élevé : première zone de production et premier exportateur mondiale de textiles techniques, avec 60 % des exportations mondiales en 2002, le continent jouit encore d’un solde extérieur confortable. Sa prééminence reste également forte dans le domaine stratégique des machines textiles. L’Allemagne caracole en tête, réalisant à elle seule 23 % des exportations mondiales. Mais la France possède aussi un potentiel significatif . Son rang ? 2ème producteur et exportateur européen, avec 6 % du commerce mondial (au coude à coude, il est vrai, avec la Suisse et la Grande-Bretagne). 400 entreprises, principalement des PME, réalisent dans notre pays un chiffre d’affaires d’environ 5 milliards d’euros dans les textiles techniques. Parmi elles, beaucoup de « fileurs » ou de « tisseurs », qui ont su se diversifier hors des matériaux traditionnels. Ils peuvent s’appuyer, en amont, sur une industrie des matériaux (verre et carbone notamment) compétitive. Nos « pôles de compétitivité » ? La Picardie, Champagne-Ardennes, le Nord-pas de Calais et surtout Rhône Alpes ou se concentrent autour de Lyon par moins 170 entreprises, parmi lesquelles on peut citer Gibaud, Freudenberg, Adidas-Salomon, CTMI, Carbone industries, Bertheas, Hexcel composites, Dickson, Porcher industrie…

Mais les entreprises du secteur, affaiblies par la stagnation des marchés et la concurrence étrangère, n’ont pas toujours pu consentir l’effort de RD.et d’innovation nécessaire à la préservation de leur avance technologique. En amont, les positions européennes se sont détériorées dans le domaine des fibres chimiques, au profit notamment du Japon, tandis que l’Amérique du nord renforçait sa maîtrise sur des techniques nouvelles comme la micro-encapsulation. Simultanément la croissance rapide du marché asiatique (qui est en train de supplanter l’Amérique du nord à la première place, reléguant l’Europe à la troisième place avec environ le quart de la demande mondiale de textiles techniques) permettait aux industriels de la zone – et tout particulièrement les chinois – de développer rapidement la filière, tout en rattrapant à grands pas leur retard technologique.

Si les textiles techniques offrent une opportunité réelle de redressement à l’industrie textile française, celle-ci ne se concrétisera qu’à travers un effort accru de modernisation et de structuration, en accroissant l’effort de formation et de RD, en mutualisant une partie de celui-ci à travers un renforcement des réseaux d’entreprises, en renforçant les passerelles avec la recherche publique, en essayant aussi d’attirer aussi les industriels étrangers. A l’exemple de cette plate-forte laboratoire « textiles non tissés », mise en service le jeudi 4 novembre dernier à Tourcoing, et première étape vers la création d’un grand Centre européen des textiles innovants.

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