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Chansons de Son et Boléros traditionnnelles

Son de la Loma

matamoros1 Pour lire une traduction de ce texte, cliquez sur le lien suivant : Loma.

Ecrit en 1922, ce Son est né, comme beaucoup d’autres chansons de Miguel Matamoros, d’une anecdote personnelle. A la fin d’un concert donné dans un café de Santiago de Cuba, l’auteur était en train de travailler sur une nouvelle mélodie. Il vit alors arriver une mère de famille qui lui dit : "Ma fille est folle de vos chansons et voudrait savoir d’où vous venez. Je lui ai dit :"ils viennent de la Loma[1]". Et depuis, elle me répète sans arrêt : "Maman, ils viennent de la Loma"". C’est ainsi que naquirent les paroles et le titre de la mélodie que Miguel Matamoros était en train de composer[2].

Au-delà de son côté bon enfant, cette anecdote est révélatrice de l’idiosyncrasie si particulière de Santiaguo de Cuba, ville où la création musicale semble – encore aujourd’hui – littéralement surgir de chaque maison, de chaque coin de rue, de chaque bistrot, comme une source directement jaillie de l’âme populaire. Pour quiconque connait et aime cette ville, il n’y a absolument rien d’étonnant à ce qu’une petite fille, une voisine en bigoudis, le boulanger du coin ou le conducteur d’une carriole soient un jour directement associés, d’une manière ou d’une autre, à la naissance d’une œuvre musicale, du fait de la mystérieuse et fascinante empathie existant entre les artistes de cette ville et ses habitants.

Quant au texte de cette chanson, il renferme plusieurs subtilités en forme de jeux de mots (voir lien, pages 174-175). Tout d’abord, le titre ("Son de Loma") peut prendre deux sens différents – quoique complémentaires : " Ils sont des collines" (en référence aux chanteurs) ou " Le Son des collines" (en référence au style musical). Ensuite, les termes "Loma" et Llano", au-delà de leur sens littéral (la colline et la plaine), désignent également, de manière plus imagée, une opposition entre la ville de la plaine (La Havane) et la ville des collines (Santiago de Cuba). Enfin, le patriotisme Santiaguero de l’auteur s’affirme quand il désigne dans la chanson cette ville, première capitale historique de Cuba, comme "terre souveraine", alors que ce titre est habituellement réservé à la Havane, capitale actuelle du pays.

La discographie de "Son de la Loma" est absolument gigantesque. Depuis des orchestres de son anciens comme le Trio Matamoros ou le Sexteto Ignacio Piñeiro jusqu’à des interprètes contemporains comme José Feliciano, Monguito ou le Trio Matanceros, ce sont des centaines, peut-être des milliers d’orchestres qui ont inscrit ce thème – modernisé au fil des ans pour s’intégrer au style du latin Jazz ou de la timba Cubaine – à leur répertoire. Citons parmi les plus récents, dans un désordre complet et sans évidement aucune ambition d’exhaustivité : Los guaracheros, Raiz Latina, Emiliano Salvadore, Armando Sanchez y su conjunto, Manuel Torres y su banda…

Je vous propose d’écouter ce thème dans une interprétation du Trio Matamoros, tout en lisant ma traduction.

Fabrice Hatem


[1] Des collines (ce qui, dans un sens imagé, signifie aussi : "de Santiago de Cuba").

[2] Dans une autre version de la même anecdote, l’auteur venait de donner une sérénade en pleine rue, en compagnie d’un autre musicien, Alfonso del Rio. Ils entendirent, dans une maison voisine, une voix de petite fille demander : " Maman, est-ce qu’ils sont de la Havane, ces chanteurs ?". La maman lui répondit alors: "Non, ma fille, ils sont de Santiago, ils sont de la loma".

 

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