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Discographie de Osvaldo Pugliese

ImageEditeur : La Salida n°43, avril-mai 2005

Auteur : Philippe Stainvurcel

Discographie de Osvaldo Pugliese

L’exceptionnelle longévité d’Osvaldo Pugliese nous permet de parcourir à travers son répertoire une grande partie de l’histoire musicale du tango. Fortement influencé par les musiciens de la « Guardia nueva » des années 1920, son style exerce à son tour une influence profonde sur la création de tango contemporaine, comme par exemple l’orchestre Fernandez Fierro, à côté de cet autre courant majeur qu’est la musique électronique de type « Gotan project ».

Au départ considéré comme peu commercial par la peu clairvoyante industrie du disque argentine, il ne commence à enregistrer qu’en 1943, quatre ans après la la formation de son premier orchestre. La filiation avec Julio de Caro est d’emblée évidente par comparaison avec les enregistrements de celui datant de 1926 ou 1927(Julio de Caro, el bandoneon, EBCD n° 6). C’est notament le cas pour les deux versions de Recuerdo (1924), la célèbre compostion de Pugliese, enregistrée, à 17 ans d’intervalle, par les deux orchestres. Mais là où de Caro était souvent indansable par ses brusques ruptures de rythme et ses trop longues envolées de violon, Pugliese, tout en reprenant cette structure rythmique, dépassera le maître pour le plus grand bonheur des danseurs. Osvaldo Pugliese y su orquesta tipica, Recuerdo (1944-1945), EBCD n°71.

Pugliese accordait moins d’importance aux textes que Troilo, ce qui ne l’empêche pas, dès 1943, d’être accompagné des deux extraordinaires chanteurs que sont Roberto Channel et Alberto Moran. Ecouter Farol des frères Exposito, chanté par R. Channel et, en duo avec A. Moran, Una vez de Catulo Castillo sur une musique de Pugliese. Osvaldo Pugliese y su orquesta tipica, El dia de tu ausencia, collection El bandoneon n° 96, distribué par tangomiamor.com

La yumba : une onomatopée qui définit le style du tango pugliesien. Egalement une de ses plus grandes compositions (1943). La pulsation rythmique guide les pas des danseurs, se suspend d’un coup pour laisser les violons développer leur mélodie, puis reprend pour faire réapparaître le parquet sous les pas des danseurs. Des contrastes que Pugliese approfondira jusqu’à la fin de sa vie. Osvaldo Pugliese y su orquesta tipica, La yumba (1945-1947), Maestros del tango argentino, BMT 010 (1995)

Vers 1949, la formation semble acquérir une puissance nouvelle, grâce à une amplitude accrue des arrangement orchestraux. Une évolution qu’accompagne la voix puissante de Jorge Vidal. Cette année-là, le maître compose également Maladranca. Osvaldo Pugliese y su orquesta tipica, canta Jorge Vidal (1949) EBCD n° 5. On trouve dans cet enregistrement l’une des milongas les plus rapides du siècle, Un baile a beneficio.

Signalons deux compilations avec le chanteur Alberto Moran,une des plus profondes et plus chaudes voix du tango. Ecoutez Pasional et porque no te tengo mas, sans hésitez à vous asseoir. Osvaldo Pugliese con Alberto Moran, Reliquias, 495373-2 EMI (1998) et vol 2: 724352911226

Puis, à partir des années 50, c’est l’épanouissement de son génie musical et de chef d’orchestre : longues et lentes introductions suivie d’une immense vague déferlante, suspension de l’instant et densité du silence, son retenu puis déversé comme une pluie torrentielle, sensation aérienne des mélodies qui se déploient comme les ailes d’un oiseau migrateur au dessus de l’océan… On trouve ces caractérisques dans des tangos comme Emancipation en 1955, Pata ancha en 1957, Orgullo criollo en 1956, et tant d’autres. .. On goûtera également le climant envoûtant de Gente de teatro et de Balada para un loco, et les voix puissantes de Jorge Maciel et Alfredo Belusi. Une extrordinaire compilation nous est proposés avec : Osvaldo Pugliese, from Argentina to the world, 8378572 EMI (1996). Le panorama va de 1955 à 1977. Ecouter enfin dans ce CD Malena dans une version qu’aujourd’hui tous les musiciens imitent.

La collection Reliquias distribuée par musicargentina.com nous propose
trois compilations qui élargissent le panorama. Osvaldo Pugliese, A los amigos, 8374072 EMI Osvaldo Pugliese, instrumentales inolvidables, vol 2 724349998520 EMI et vol 3 7243499962-2-9 EMI

Chez Polydor, une miraculeuse compilation rassemble des enregistrements de A Orlando Goni, Don Augustin Bardi, Nostalgico, A Evaristo Carriego et Adios Nonino. Des interprétations de très grande valeur artistique. Les danseurs-mélomanes ne s’y tromperont pas. Osvaldo Pugliese, tradicion 20 temas, Nostalgico, Polydor 539332-2

Polygram nous offre en six volumes une anthologie assez complète du répertoire du maître. On y entend les fortes voix de Jorge Maciel, Alfredo Belusi (parfois en duo), Abel Cordoba. Du candombe à Carmen, ça vaut le détour. On y trouve plusieurs interprétations marquantes de thèmes de Piazzolla : Verano porteno, Balada para un loco, Nonino, Bando. Osvaldo Pugliese y su orquesta tipica, Antologia vol 1 522375-2 Philips, vol 2 522376-2, vol 3 522377-2, etc.

Pour clore ce rapide parcours discographique, signalons deux albums « live », désormais mythiques.

En 1985, le concert donné Pugliese au théâtre Colon de Buenos Aires permit,pour la première ois, d’entendre du tango dans ce temple de la musique cultivée. Une musique majestueuse s’élève devant une public réuni pour un hommage définitif. Osvaldo Pugliese grabado en vivo en el teatro Colon de Buenos Aires, 26/12/85 724352227327 EMI.

Le dernier enregistrement live de Pugliese, au  » Carré d’Amsterdam, date de 1989. Les mêmes tangos qu’un demi siècle plus tôt dans un son cristallin et un jeu inoui sur les silences. Goûter la puissance contenue et vaguement menaçante de Recuerdo et Mala junta, les vagues musicales ininterrompues de A Evaristo Carriego , l’interprétation indépassée de Desde el Alma, la valse de Rosita Melo. L’album se termine sur La yumba qui se transforme magiquement en Adios Nonino quand Piazzolla rejoint Pugliese sur scène. 13 minutes de bonheur. Osvaldo Pugliese y Astor Piazzolla, vol 2, Finally together, Lucho,
8315392 (1992).

 » Il faut écouter les silences, ils n’ont jamais le même son ».

Philippe Stainvurcel

Pour en savoir plus sur Pugliese : /2006/04/28/le-musicien-osvaldo-pugliese/

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