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Reflets du cinéma latino-américain

La guayaba

Drame de Maximiliano González, Argentine, 2012, 87 minutes

ImageDans un village de la région de Missiones, une jeune fille venue d’une famille pauvre se voit proposer un emploi de bonne à tout faire. Mais elle est en fait entraînée dans un réseau de prostitution, séquestrée, et obligée de travailler dans des conditions effroyables. Parviendra-t-elle à échapper à ses geoliers ?

A l’heure où est en train d’être voté en France une loi de pénalisation des clients de la prostitution,  ce film arrive à point nommé pour illustrer les enjeux du débat et le fonctionnement pervers des œuvres de propagande. Il présente en effet la prostitution sous un angle particulièrement hideux : d’innocentes jeunes filles sont victimes de trafiquants sans scrupules, battues, menacées, drogués, violées, et finallement, dans le pire des cas, tuées plus ou moins volontairement. Face à cette situation, les clients apparaissent comme une bande de jouisseurs se livrant à leur plaisir sordide sans aucune considération pour la souffrance, pourrant bien apparente, des victimes.

Si cette image de la prostitution correspond à la réalité – et c’est sans doute effectivement vrai dans un certain nombre de cas, notamment dans certains pays en développement et dans certaines régions d’Argentine – alors il s’agit bien d’un fait de société inacceptable, qui appelle une réponse pénale forte. Mais si cette fiction ne faisait que décrire une partie d’un phénomène beaucoup plus complexe, dont certains aspects appartiennent au domaine des libres choix personnels ou des mystères du désir et du plaisir, alors elle risque de conduire à une stigmatisation injuste car trop globalisante du désir et des besoins masculins, tout en passant sous silence la réalité de stratégies féminines parfaitement assumées par les intéressés.

Or, un certain nombre d’invraisemblances scénaristiques et d’exagérations manifestes suggèrent justement que l’on pourrait avoir affaire ici, non à la description objective d’une situation complexe, mais à un brûlot abolitionniste. Situation noircie à loisir pour installer l’idée d’une réponse radicale, manichéisme de genre présentant les hommes comme d’affreux jouisseurs et les jeunes femmes comme d’innocentes victimes : La Gayaba réunit les caratéristique d’un film de propagande totalitaire. On en sort abolitionniste convaincu, comme on pouvait sortir antisémite de la projection du Juif Suss ou communiste de celle de A nous la liberté. Quant à l’aspect cinénématographique, c’est très moyennement filmé et interprété, avec des personnages sans beaucoup de consistance et des prises de vue sans grande originalité.

Fabrice Hate

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