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Cinéma de Tango

Manzi, un poeta en la Tormenta (Manzi, un poète dans la tourmente)

Bio-fiction de Eduardo Spagnuolo, Argentine, 2009, 97 minutes

 ImageHomero Manzi (1907-1951) n’a pas seulement été un parolier de tango célèbre. Il fut aussi poète, journaliste, scénariste, metteur en scène et militant politique progressiste, d’abord au sein du parti radical, puis aux côtés du général Perón. Un poeta en la tormenta nous permet de découvrir les multiples facettes de ce témoin important de l’histoire argentine du XXème siècle.

«Je n’ai écrit que les choses que j’ai vécues » a dit un jour l’auteur de Sur. L’un des grands mérites de ce film est de nous faire sentir comment, à chaque étape de sa vie, l’inspiration poétique et littéraire prend sa source dans son expérience personnelle. Chacune des séquences, mise en scène comme une petite scène de théâtre et entremêlée d’images d’archives, est illustrée par des extraits de l’oeuvre de Manzi : textes et poèmes dits en voix off, chansons de tango….

Nous comprenons ainsi que la poésie nostalgique du faubourg, celle de Sur et de Barrio de tango, tire directement sa substance de la jeunesse de Manzi dans le quartier de Nueva Pompeya. Nous prenons la mesure de son engagement politique dans le radicalisme puis à le péronisme à travers de nombreuses scènes évoquant ses luttes étudiantes, son incarcération en 1931 sous le gouvernement militaire du général Uriburu, sa rupture avec le parti radical lorsqu’il prend parti pour le mouvement justicialiste du général Perón. Son activité prolifique de scénariste et de metteur en scène de cinéma est illustrée par de très nombreux extraits de ses films, comme Fortin Alto, Huella, La Guerra Gaucha, El Último Payador, ou l’on ressent fortement la marque de ses convictions à la fois populistes et patriotiques. Quant aux souffrances des dernières années de sa vie – sa maladie, l’amour clandestin et douloureux qui l’unit à la chanteuse Nelly Omar – elle se reflète dans des chansons et exaltées et déchirantes, comme Fuimos, Che Bandoneon ou Discepolin, écrit par Manzi trois jour avant sa mort en hommage à un autre grand poète, Enrique Discepolo, qui venait de disparaître.

L’écriture cinématographique est légère et agréable, aérés par d’excellentes séquences musicales et dansées. Il y a de jolies trouvailles comme cette scène de prison où le décor de la cellule est constitué par le dessin qu’en fit à l’époque Manzi. La chaleur de la vie familiale, la vie politique avec sa successions de joies, de colères, de déceptions, de discussions enflammées, la fébrilité de l’activité journalistique, notamment à la tête des nouvelles filmées Noticias Panamericanas, enfin, la progression inexorable du cancer qui va l’emporter en 1951 sont très bien rendues grâce au jeu énergique et convaincant des acteurs. Carlos Portaluppi, en particulier, est excellent dans le rôle-titre. Un émouvant témoignage du fils d’Homero, Acho Manzi, par ailleurs co-auteur du scénario, vient rajouter à la fin du film une touche d’intimité vécue.

Ce film réussi, sans lourds attirails de mise en scène, apporte la preuve qu’il est possible de réaliser un excellent docu-fiction sans disposer de moyens gigantesques.

Fabrice Hatem

Pour plus de renseignements sur ce film : https://www.imdb.com/title/tt1517191/

Pour visionner quelques extraits de ce film : https://www.youtube.com/watch?v=QrERXVAjldo

 

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