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Jesus-Manuel Hechavarria-Ulloa « Nano » : Vers la rumba du XXIème siècle ?

Par Fabrice Hatem

nanosite2 J’ai rencontré Nano, de son vrai nom Jesus-Manuel Hechavarria-Ulloa, à Santiago de Cuba au début du mois d’Octobre 2010. Il était chargé de la difficile mission d’apprendre la Rumba cubaine à un monsieur européen d’âge mur, légèrement dyslexique, atteint de graves problèmes de coordination corporelle et souffrant d’a-rythmie chronique : moi -même. Il mena cette tentative désespérée jusqu’à son terme avec une abnégation et une patience totalement injustifiées.

Les cours se déroulaient sur la terrasse de mon hôtesse Maritza, devenue depuis devenue une amie. Ce lieu est pour moi riche de souvenirs de toutes sortes, puisque c’est là que j’ai tourné, avec mes partenaires Darita, Maria et Lizi, la plus grande partie de mes 100 démonstrations de figures de Salsa, et que j’ai participé à de mémorables fêtes.

Le jeune Nano est un artiste très complet. Né en 1984, il est d’abord musicien, – plus nanosite6 exactement trompettiste – de formation. Il pratique également la peinture. Mais c’est aujourd’hui la danse, et plus particulièrement la danse afro-cubaine et la Rumba, qui constitue le cœur de sa démarche artistique.

Celle-ci suit deux axes complémentaires : d’une part, la recherche d’une fusion entre les différents styles de danses cubaines et plus généralement des Caraïbes, qu‘il s‘agisse d‘afro-cubain au sens strict (Orishas, Palo), de danses cubaines traditionnelles (Rumba, Son), ou de danses de loisir plus contemporaines (Cha Cha Cha, Salsa) ; d‘autre part – démarche évidement complémentaire de la précédente – une modernisation de l’esthétique des danses traditionnelles par l’introduction de références au break-dance et au hip-hip – styles qui ne sont d’ailleurs eux-mêmes que des rejetons des mêmes racines africaines transplantées dans le nouveau monde.

Mais je laisse maintenant la parole à Nano pour qu’il vous commente lui-même son travail.

nanosite5 Comment as-tu commencé à t’intéresser aux danses Afro-cubaines et à la Rumba ?

Il y a huit ans, j’étudiais la trompette à l’école Esteban Salas de Santiago de Cuba. J’ai vu jouer de la Rumba dans les classes de percussions. Cela m’a ébloui et donné envie de danser cette musique. Je suis allé voir les groupes folklorique Oriente et Cotumba et j’ai commencé à danser avec eux. Au début, en me jetant à l’eau au milieu de ces danseurs souvent de très bon niveau, j’étais un peu anxieux, mais aussi très heureux. Et cette pratique régulière m’a ensuite permis de progresser très rapidement. Je me suis bientôt rendu compte qu’à travers la pratique de la Rumba, je pouvais parvenir à accroître considérablement ma conscience et ma maîtrise corporelles, et donner ainsi plus de caractère et de saveur à ma danse, y compris dans tous les autres styles, comme la Salsa.

Mais cela a supposé un investissement total dans l’apprentissage. En effet, cette danse très athlétique demande beaucoup d’énergie et de vivacité dans les mouvements, et implique une grosse sollicitation cardiaque. Elle suppose donc que l’on soit en excellente condition physique et que l’on apprenne à bien contrôler son souffle.

nanosite4 Comment pourrais-tu définir ta recherche chorégraphique ?

Je cherche à fusionner toutes les formes de danse latino américaines, mais en centrant ma démarche sur la danse populaire traditionnelle cubaine et afro-cubaine.

De laquelle de tes chorégraphies tires-tu le plus de fierté ?

Je suis très fier de la chorégraphie que j’ai réalisée avec mon partenaire Pedro sur la chanson Mercado Negro. J’ai essayé dans cette œuvre d’opérer une fusion de différents styles : Columbia, Yambu, Guaguanco, Abakua. La première partie inclut des mouvements de Rumba, et la seconde partie est un mélange de Palo (Congo) et de Vaudu Haïtien. Cette chorégraphie me semble dégager une grande impression d’énergie et de caractère.

nanasites1 Et la chorégraphie Fusion Cubana (voir photos)?

Cette chorégraphie, également dansée avec Pedro, est composée de trois parties. La première a été réalisée sur la chanson de Manolito Simonet "72 Hacheros". En écoutant cette musique au rythme assez rapide, j’ai été impressionné par la qualité de sa section rythmique et de percussions. Cela m’a inspiré pour réaliser une chorégraphie combinant des éléments de Hip-hop avec de la Rumba, de la Salsa, du Cha-cha-cha, et de l’Afro, sur une musique assez rapide.

nanasite7 Dans la deuxième partie, je danse sur une composition de la Sonora Carouselles, "Al son de los cueros". J’y ai introduit un peu plus de mouvements d’Afro-Cubain. J’introduis également un changement rythmique de la Salsa vers le Son.

Puis, dans la troisième partie, je reviens à la Salsa avec une chanson de Irakere, " Atrevimiento". J’ai utilisé cette chanson très rapide comme base pour des mouvements de salsa très énergiques auxquels j’ai ajouté un peu de Rumba, notamment vers la fin.

Le travail de préparation a été assez long. Mais je suis heureux du résultat.

nanosite7 Quels sont très projets actuels ?

Je voudrais pouvoir venir présenter mon travail en Europe. Pour cela, je continue à me préparer et à présenter mon travail, chaque fois que je le peux, à Santiago et à Cuba.

Propos recueillis par Fabrice Hatem

retrouvez les vidéos de Nano sur : https://www.youtube.com/user/MrNanoDance

Je voudrais rajouter – une fois n’est pas coutume – une petite remarque plus personnelle à la fin de cet article. Nano n’a pas seulement été pour moi un professeur attentionné et patient, mais il est aussi devenu, ainsi que sa femme Diana, un véritable ami. J’ai passé avec lui, dans l’hospitalière maison de Maritza, des soirées merveilleuses de fête et de danse. Ceci m’a aussi permis d’apprécier ses qualités de danseur de Salsa – dans son style hyper-énergique si particulier. Nano, je sais que tu souhaites venir en Europe pour y présenter ton travail et j’essayerai, dans la mesure de mes très faibles moyens, de t’y aider.

Si vous êtes intéressé par le travail de Nano, comme enseignant, danseur et chorégraphe, vous pouvez le joindre au numéro suivant : 00 53 22 656 645.

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