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Processus de Barcelone : constat d’échec ou relance ?

Editeur : Le Nouvel économiste, n°1320, 21 octobre 2005

Auteur : Fabrice Hatem

Processus de Barcelone : constat d’échec ou relance ?

nouvelecocom Il y a dix ans, était lancé dans l’enthousiasme le « Processus de Barcelone » : un vaste partenariat euro-méditerranéen financé par l’union européenne, ayant pour objectif d’accélérer le processus de développement des pays du sud de la Méditerranée et de favoriser l’intégration économique entre les deux rives du « Mare nostrum ». Mais cet anniversaire, qui sera commémoré à Barcelone les 27 et 28 novembre prochains, risque d’avoir un goût amer, tant le bilan semble éloigné des ambitions initialement affichées.

Certes, la réalisation des accords d’association, prévoyant la mise en place à l’horizon 2010 d’une zone de libre échange entre l’union européenne et 10 pays méditerranéens concernés, dits « MEDA », est en bonne voie. Certes, Chypre et Malte ont rejoint l’union depuis le début de cette année. Mais pour le reste, que de déceptions ! La part des pays MEDA dans les échanges commerciaux ouest-européens est restée, au mieux, stagnante. Les entreprises européennes, rebutées par un environnement local des affaires peu favorable et par la fragmentation du marché méditerranéen, ont peu investi dans la région. Cantonné à un cercle très restreint d’experts et de diplomates internationaux, le « Processus de Barcelone » a rencontré peu d’écho dans les sociétés civiles. Résultat : beaucoup de rancœurs accumulées dans les pays du sud, face à des promesses considérées comme non tenues ; et une réticence inavouée dans ceux du nord, face à des partenaires dont les réformes structurelles sont jugées trop timides, qu’il s’agisse d’ouverture à la concurrence, de modernisation de l’administration, ou d’assainissement du secteur bancaire. Un échec qui contraste douloureusement avec la l’intégration rapide des pays de l’est au reste du continent européen. Et qui laisse sans réponse les enjeux régionaux, comme la nécessité de créer dans les pays du sud méditerranéen 40 millions d’emplois au cours des 20 prochaines années pour absorber le choc démographique, ou la création souhaitable d’un ensemble euro-méditerranéen intégré, permettant d’exploiter les complémentarités potentielles entre nord et sud de la région afin de mieux faire face à la poussée asiatique.

Face à ces enjeux, deux attitudes sont possibles : la première consiste à prendre acte de l’échec du processus de Barcelone et à limiter les ambitions européennes à une poursuite, à petit feu, de la coopération économique, accompagnée d’un effort accru dans le domaine sécuritaire. C’est en gros la philosophie qui tend la déclaration en cours de préparation par la présidence anglaise de l’Union. Elle revient, en fait, à sacrifier le partenariat euro-méditerranéen par rapport à d’autres objectifs considérés comme plus prioritaires, comme l’intégration des 10 nouveaux membres de l’est européen. L’autre option consiste à relancer ce partenariat sur des bases assainies. C’est celle est préconisée par des experts des deux rives de la Méditerranée réunies à Marseille les 1er et 2 octobre dernier à Marseille, à l’initiative de l’Institut de la Méditerranée et du Cercle des économistes. La création d’une structure euro-méditerranéenne paritaire permanente, l’instauration d’une « communauté euro-méditerranéenne des connaissances » sur le modèle de la CECA, la création d’une banque euro-Méditerranéenne de l’investissement destiné à financer de grands projets d’infrastructures, mais également le développement des PME, un renforcement des coopérations directes entre les collectivités locales des deux rives : telles sont les propositions qui ont été rendues publiques à cette occasion. Un programme d’action sans doute coûteux, mais qui a au moins le mérite de poser clairement les termes du choix géostratégique qui devra être fait par l’Union d’ci quelques semaines.

Fabrice Hatem

 

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