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La filière textile-confection européenne entre crise et espoirs

Editeur : Le nouvel économiste, avril 2004
Auteur : Fabrice Hatem

La filière textile-confection européenne entre crise et espoirs

nouvelecocom Le 14 janvier, le fabricant de Tergal français Bel air annonce sa décision de délocaliser sa production vers l’Afrique du Sud. Fin janvier, le textilier français VEV est mis en redressement judiciaire. Le 4 février, le fabricant italien de sous-vêtements Calzedonia ouvre une nouvelle usine à Gabrovo, en Bulgarie Centrale. Cette litanie déprimante et coutumière des fermetures de sites et des pertes d’emploi illustre le mouvement général qui pousse l’industrie de la confection ouest-européenne, et, dans une moindre mesure, celle du textile, à s’implanter ou à sous-traiter dans les pays à bas coûts de main d’œuvre, notamment en Europe de l’Est. Avec des écarts de coût horaires de main d’œuvre de 1 à 15 (comme pour la Bulgarie), voire de 1 à 30, comme pour la Roumanie, comment s’en étonner ? L’ensemble de la filière textile-habillement de l’union européenne a ainsi perdu près d’un million d’emplois entre 1990 et 2003, passant de 3 à 2 millions de salariés. Et l’union importe aujourd’hui plus de 50% de sa consommation intérieur de vêtements.

Avec le démantèlement prochain de l’Accord multi-fibre en 2005, les dernières barrières aux importations en provenance d’Asie disparaîtront. Les effets de ce « big bang » peuvent être redoutables, en achevant de submerger ce que reste de la filière : car, après l’assemblage, pourquoi ne pas voir se délocaliser également la phase de découpe, puis le reste de la filière textile, voire même nos compétences en matière de design des tissus et des modèles ? Grand bénéficiaire probable : la Chine, qui alimente déjà 20 % des importations européenne de vêtement.

Cette perspective inquiétante n’est cependant pas fatale. Il existe en effet des opportunités de marché et des atouts technologiques qui laissent entrevoir un scénario de renaissance.

Les opportunités de marché : la demande croissante de personnalisation, le renouvellement accéléré des gammes, la nécessaire réactivité aux effets de modes, constituent autant de facteurs incitant à une localisation de la production à proximité du marché européen : il faut que la créateurs puissent « sentir » l’air du temps et que l’approvisionnement des points de ventes soit rapide. Ainsi, des producteurs comme Zara ou Kickers, qui ont fondé leur compétitivité sur ces principes, fabriquent en Europe (respectivement Espagne et Belgique) une grande partie de leurs produits. Chanterelle a réussi à maintenir son niveau d’emploi en France en spécialisant ses sites français sur des activités à plus fort contenu en innovation et en valeur ajoutée, tout en délocalisant sa production de masse.

Les atouts technologiques. L’image d’une industrie textile employeuse de main-d’œuvre non qualifiée et peu intensive en recherche appartient déjà au passé. La mise au point des tissus du futur (anti-tâche ou anti-transpiration, hydrophobe, régulateurs thermiques, photoprotecteurs, capteurs biologiques,….) suppose un environnement technologique évolué que seuls offrent pour l’instant les pays développés. Dans la confection, l’introduction de machines plus performantes (machines à coudre évoluées, production assistée par ordinateur), sans permettre une automatisation complète de la phase d’assemblage – la plus gourmande en main d’œuvre -, permet de réduire les différentiels de coûts de production.

Les résultats sont déjà là : le producteur américain GSE vient par exemple d’investir 2 millions d’euro sur son site de Rechlin en Allemagne pour accroître sa production de textiles geosynthétiques. Et la France, 2ème pays européen pour les textiles géosynthétiques, capitale de la mode et de l’innovation textile avec ses salons parisiens comme Texworld, Expofil, Première vision, Mod’amont, Made in France, a des atouts immenses à faire valoir.

La confection européenne et française pourrait alors trouver un nouvel équilibre, fondé sur des productions à plus petites séries, pour des produits à plus forte valeur ajouté (textile et design) et mettant en œuvre des outils de production modernes. Elle offrirait des emplois, sans doute en moins grand nombre, mais également plus qualifiés que par le passé et plus orientés vers les fonctions de conception, de management et de logistique. L’AFII peut jouer un rôle important, en liaison avec les organisations professionnelles concernées, pour promouvoir à l’étranger cette image positive d’une industrie française de la confection modernisée et confiante en l’avenir..

Pour une étude sur la filière textile-confection Euro-Méditerranéenne : /2004/12/09/la-filiere-textile-confection-dans-la-region-euro-mediterraneenne/

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